Le Président de l’Assemblée nationale, S. E, M. Alassane Bala Sakandé s’est adressé lundi, aux participants à la 139ème session de l’Union interparlementaire (UIP), qui se tient du 14 au 18 octobre à Genève. sur le thème : « Le rôle primordial des parlements dans la promotion de la paix et du développement à l’ère de l’innovation et du changement technologique ».
  • Monsieur le Président ;
  • Distingués chefs de délégations ;
  • Mesdames et messieurs ;
Je voudrais en propos liminaire m’associer à ceux qui m’ont précédé à cette tribune pour adresser, au nom de la délégation du Burkina Faso et en mon nom personnel, mes vives félicitations à l’UIP et particulièrement au secrétariat général pour l’organisation réussie de cette 139ème Assemblée, en particulier pour les bonnes conditions de travail qui nous sont offertes.

Mesdames et messieurs ;

Au vingtième siècle déjà, la réflexion qui retient notre attention en cette 139ème Assemblée de l’IUP avait conduit le biologiste et écrivain français Jean Rostand à conclure : « La science a fait de nous des dieux avant même que nous méritions d’être des hommes. » Depuis leur avènement, les découvertes scientifiques puis technologiques n’ont cessé d’améliorer les conditions de vie de l’homme. Depuis quelques décennies, la convergence numérique des industries des télécommunications, de l’audiovisuel et de l’informatique réduit considérablement les distances entre les hommes et les peuples désormais réunis dans un village planétaire. L’essor prodigieux des sciences numériques et de la technologie et les changements profonds qu’elles induisent dans tous les secteurs de la vie et dans toutes les régions du monde, en font un sujet d’intérêt qui s’étend désormais bien au-delà du cercle restreint des seuls experts en la matière.

Mesdames et messieurs,

C’est moins la science que son usage dévoyé qui a fait dire que nous sommes devenus dieux avant d’avoir la sagesse et l’éthique de l’homme accompli. Le premier écueil de l’ère technologique est bien évidemment la fracture ou facture numérique qui sépare chaque jour un peu plus les info-pauvres des info-riches. Par ironie du sort, et paradoxalement, le deuxième écueil se trouve être le libre et l’égal accès des forces du bien et celles du mal aux outils technologiques. En effet, autant les hommes épris d’humanisme y trouvent des moyens d’apprendre à lier le bois au bois, autant des groupes non étatiques y trouvent leur compte pour fabriquer des engins explosifs artisanaux qui sèment la mort et la désolation dans le Sahel, au Nigéria, en Syrie, en Irak et ailleurs dans le monde. Les pouvoirs quasi illimités de la convergence numérique permettent aussi de nombreux et pernicieux usages des technologies à des fins criminelles : escroquerie en ligne, dissémination de virus informatiques, activation à distance d’engins explosifs, usurpation d’identité, etc.
  • Monsieur le Président ;
  • Mesdames et messieurs ;
La promotion de la paix et du développement dans un tel contexte pose nécessairement la double problématique de l’utilisation des opportunités offertes par les technologies nouvelles et la nécessité d’édicter les principes éthiques qui doivent les encadrer. A partir de cet instant, le rôle des parlements et des parlementaires devient évident, non seulement dans l’établissement ou le renforcement de passerelles entre scientifiques et citoyens, d’une part, et entre scientifiques et politiques, d’autre part. Il est aussi attendu du législateur sa contribution à la création ou à la promotion d’un environnement juridique et institutionnel favorable au développement des nouvelles technologies et à leur utilisation décente.

Mais cela à mon sens, implique que le parlementaire lui-même soit régulièrement à jour de l’actualité scientifique et technique, non pas forcement en tant qu’expert, mais en tant qu’utilisateur potentiel et acteur pouvant influencer les choix et politiques publiques dans la prise en comptes des innovations et nouvelles technologies.

C’est dans cette dynamique que nous avons à l’Assemblée nationale du Burkina Faso, entériné tout récemment la création d’un réseau parlementaire sur les biotechnologies, une thématique qui continue d’alimenter beaucoup de divergences dans nombre de pays, faute d’informations justes ou plutôt par excès d’informations erronées. C’est toujours dans l’objectif du renforcement du dispositif juridique et institutionnel que nous avons, en partenariat avec l’Organisation Internationale de la Francophonie, initié l’année dernière un audit de l’ensemble de la législation sur la cyber-technologie afin de nous permettre d’avoir un état des lieux actuel de la cyber-législation et proposer les mises à jour qui s’imposent. Cette expertise nous a permis d’élaborer trois propositions de loi respectivement sur :

  • La cybercriminalité ;
  • la protection des données à caractère personnel ;
  • et les transactions électroniques.
  • Distingués délégués ;
  • Mesdames et messieurs ;


La convergence numérique a ceci de formidable qu’elle a réhabilité l’individu et le citoyen que la communication de masse avait marginalisés. L’autonomie des usages des technologies qui s’est accrue exige une plus grande responsabilisation du citoyen qui doit avoir une pleine connaissance des effets de ses nouveaux pouvoirs pour se fixer lui-même des lignes rouges à ne pas franchir.

Mais endiguer l’utilisation néfaste de la science peut-il être durable sans une coopération renforcée entre les Etats et sans une moralisation profonde de nos sociétés ? La question reste posée mais il me semble que non. Nous devons donc travailler à davantage renforcer non seulement le sens de l’éthique au sein de nos communautés, mais également la collaboration entre nos institutions dans le cadre d’un partenariat technique et d’une solidarité active et proactive pour éradiquer l’utilisation criminelle des résultats de la science.

Mesdames et messieurs ; Sans avoir été exhaustif, c’était là les quelques pistes de réflexion que j’ai souhaité partager avec vous dans le cadre de notre débat. Je vous remercie !